Pénibilité et praticiens hospitaliers : Pour un texte négocié sans déni des réalités

Comment en est on arrivé à s'interroger sur la pénibilité de notre activité professionnelle ? Depuis trop longtemps les pouvoirs Publics ont négligé de s'intéresser à nos conditions de travail, préjugeant que la valorisation intellectuelle, notre place dans la société, notre pouvoir supposé pourraient occulter les désagréments liés à la réalité de nos pratiques.

Notre activité médicale est-elle pénible ? Notre métier, qui a demandé tant d'efforts et de sacrifices pour y accéder, est forcément un choix délibéré dans lequel le paramètre pénibilité était inclus. C'est l'absence de reconnaissance qui n'est pas acceptable. Il doit y avoir une prise en compte normale par une juste compensation.

Il est évident que nous pourrions d'emblée nous polariser sur le travail de nuit qui est reconnu par toutes les instances du travail comme une charge pénible, rendant difficile la vie du praticien et engendrant potentiellement des troubles physiques et psychosomatiques. D'autres paramètres doivent être considérés avant.

EST-CE QUE TRAVAILLER A L'HOPITAL PUBLIC EST PENIBLE ?

OUI, dans la mesure où les conditions de travail ne sont pas toujours satisfaisantes. Ces conditions sont en partie la résultante d'un contexte économique difficile mais également les conséquences de la réglementation en vigueur, des horaires imposés, des cadences de travail, d'une somme d'activités administratives à absorber, de l'impossibilité de programmer un travail d'équipe serein au sein d'une vie communautaire hospitalière où les pratiques sont multiples et générateurs d'exigences individuelles.

EST-CE QUE L'ENVIRONNEMENT SOCIAL REND NOTRE EXERCICE PENIBLE ?

Certains patients montrent une agressivité plus forte. Corrélativement la société est plus exigeante en termes de prise en charge, gageant qu'elles seront source de résultats.

EST-CE QUE NOUS SOMMES DANS UNE SOCIETE OU L'INFORMATION CIRCULE DE PLUS EN PLUS VITE

où la demande d'un traitement se fait plus rapidement que l'évaluation de celui-ci, où le résultat doit être immédiat ? Effectivement nous semblons être dans une société qui sollicite le tout, tout de suite et partout.

EST-CE QUE CELA REND PENIBLE LE TRAVAIL ?

OUI. La cadence des comptes-rendus, des courriers, des réunions diverses et variées s'accélère et alourdit la charge de travail directement médicale.

EST-CE QUE LA CONTINUITE DE NOS SOINS EST PENIBLE ?

OUI, parce qu'il nous faut assurer cette continuité qui est l'essence même de notre métier et c'est là que le travail de nuit et la permanence de l'accueil trouvent leurs places.

EST-CE QUE CE TRAVAIL DE NUIT EST PENIBLE ?

OUI.

EST-IL RECONNU COMME TEL ?

PARTIELLEMENT. Si la permanence des soins sur place fait partie du temps de travail, l'astreinte à domicile qui concerne une grande partie des activités médicales de nuit est scandaleusement négligée.

DOIT-IL ETRE MIEUX VALORISE FINANCIEREMENT ?

OUI. Mieux pris en compte dans le temps de travail et différencié du temps de jour, probablement.

La question du temps de travail s'intrique dans la réflexion sur le travail de nuit. Le rythme de travail est également essentiel dans la prise en compte de la pénibilité de l'activité du praticien hospitalier.

L'INPH propose :

de répartir le temps de travail en cinq plages sur les vingt quatre heures de la journée : deux plages de jour et trois plages de nuit.
La réduction de la pénibilité reposerait alors sur la possibilité d'effectuer au maximum trois plages par vingt quatre heures : soit trois plages de nuit soit deux plages de jour et une plage de première partie de nuit.

LA LOI HOPITAL, PATIENT, SANTE ET TERRITOIRES (HPST) A T-TELLE RENDU PENIBLE NOTRE METIER ?

OUI, parce qu'elle a profondément modifié les rapports entre les différents acteurs de l'Hôpital, rompu des équilibres et troublé la perception du rôle et des missions de chacun et donc de sa place dans la structure. Doit-elle être profondément réformée ? Oui.

La totalité du corps des praticiens hospitaliers dira, chacun dans sa spécialité, que son métier est pénible. Il ne faut en aucun cas comparer le travail du chirurgien, de l'anesthésiste, du dermatologue, du radiologue... Comment évaluer la pénibilité de l'entretien d'un psychiatre confronté à des situations sociales et psychologiques extrêmement difficiles ? Cela est impossible. Comment quantifier la pénibilité de l'activité du pédiatre néonatalogiste qui annonce un pronostic particulièrement sombre à une famille qui vient de vivre l'évènement heureux d'une naissance ? Cela est quasiment impossible à quantifier.
Comment quantifier le poids du rapport quotidien avec la chronicité, la maladie et la mort sur l'ensemble de la durée d'une carrière ?

Faut-il inventer un instrument de mesure de la pénibilité ?
Faut-il seulement reconnaître la pénibilité comme un élément essentiel de toute pratique médicale ? Evidemment à condition qu'elle soit non dissociable de notre métier qui doit être reconnu et valorisé.

Si le terme de pénibilité confond l'activité hospitalière avec d'autres activités reconnues réglementairement il faut que nous choisissions une nouvelle sémantique mais il n'empêche que la reconnaissance de la charge émotionnelle, morale et physique de l'exercice hospitalier est immédiatement impérative.
Il s'agit maintenant de la mesurer et de tenter de la compenser.
Cette reconnaissance permettra que le choix de l'activité hospitalière perdure pour les médecins, pharmaciens et odontologistes des hôpitaux dans les années à venir.

Redonner aux PH la place centrale dans les décisions concernant leur établissement, Revaloriser la rémunération de toute la carrière, Reconnaître la contrainte de l'astreinte au niveau qui est le sien, ainsi que des conditions d'exercice à la hauteur de leur engagement et de leurs responsabilités.

C'est l'intérêt professionnel des praticiens comme celui, qualitatif, de la population qui bénéficie de l'offre de soins hospitalière.
L'INPH s'emploiera à faire ouvrir sans délai des négociations sur ce sujet essentiel pour la qualité des soins, le confort de nos patients, et la survie d'un hôpital public reconnu.

Le bureau de l'INPH